Quand Autochtones et Blancs chantent en choeur
Bruno Kistabish. Tom Mapachee
28 Juin 2011
Pikogan
« Il ne s’agit pas de vendre notre culture, mais de la partager ! »
Tom Mapachee, Anishnabe
La musique est un outil précieux de rapprochement interculturel. Elle crée des moments de rencontre et multiplie les occasions d’échanges. À travers elle, s’expriment l’attachement à sa langue et à sa culture et la volonté de les garder vivantes et de les faire rayonner. Autour d’une partition, des amitiés se nouent, comme c’est le cas au chœur de la paroisse Christ-Roi d’Amos, où Blancs et Autochtones sont sur la même longueur d’onde et chantent à l’unisson. Ainsi partagée, la musique ouvre la voie à un nouvel art de vivre ensemble, basé sur l’harmonie, la connaissance mutuelle et la reconnaissance.
Transcription d’un article publié dans le cahier Culture, section B8 du journal Le Devoir, le mardi 10 octobre 2017.
«Innu Nikamu», l’histoire d’un festival hors norme à Maliotenam par Caroline Montpetit
La trame narrative du documentaire Innu Nikamu , de Kevin Bacon Hervieux, exprime des faits réels. Il ne s’en dégage pas moins une charge symbolique impressionnante. Le film retrace l’histoire du Festival Innu Nikamu, qui célèbre depuis 34 ans la culture des Premières Nations, dans la réserve innue de Maliotenam, sur la Côte-Nord. Ce festival se tient depuis ses débuts sur les ruines du pensionnat de Maliotenam, construit en 1952, puis détruit en 1970, après avoir accueilli des milliers d’enfants.
Jusqu’en 2011, il n’en restait plus que l’ancienne cordonnerie, où le festival avait d’ailleurs établi ses bureaux. « Après un certain temps, on se demandait pourquoi certaines personnes ne venaient jamais au festival » , raconte Kevin Bacon Hervieux, qui est aussi l’un des organisateurs de l’événement. Dans la foulée des révélations sur les abus perpétrés au pensionnat et de la Commission de vérité et réconciliation, l’équipe du festival apprend que de nombreux abus ont été commis précisément dans cette cordonnerie, du temps du pensionnat. En 2011, la communauté a donc entrepris de brûler l’édifice avec du tabac, qui a une valeur sacrée dans la culture innue. « Les gens se sont sentis soulagés » , raconte Kevin Bacon Hervieux.
Le Festival Innu Nikamu est né de la collaboration de Florent Vollant avec quelques artistes, qui s’étaient réunis pour jouer sur une petite scène de Maliotenam. Le rendez-vous s’est progressivement installé chez les autochtones. Aujourd’hui, il accueille des artistes non autochtones de grande renommée, dont Simple Plan et, il y a plus longtemps, Blue Rodeo. Le documentaire raconte également comment les artistes se sont progressivement remis à chanter en innu, alors que plusieurs avaient renoncé à utiliser leur langue maternelle. C’est le chanteur Philippe McKenzie, rencontré dans le film, qui a ouvert la voie à ce courant — qui a notamment donné naissance au groupe Kashtin, qui a connu un très vif succès dans les années 1980.
En entrevue dans le film, Florent Vollant affirme d’ailleurs que la montée de Kashtin a été interrompue parce que les stations de radio ont boycotté le groupe pendant la crise d’Oka de l’été 1990. Ensuite, le groupe, qui avait alors le vent dans les voiles, n’a pas connu de remontée.
Le Festival Innu Nikamu a aussi la particularité d’être, depuis ses débuts, un festival sans alcool, ce qui complique parfois le financement. L’un des organisateurs raconte dans le documentaire comment il a organisé un bingo illégal pour le financer, avant d’être traduit en cour. Le juge a finalement condamné le festival à 250 $ d’amende, que le magistrat a offert de débourser de sa poche !
« Florent Vollant tenait absolument à ce que ce festival soit sans alcool » , dit Kevin Bacon Hervieux en entrevue. Le jeune réalisateur de 25 ans croit lui aussi que s’il y avait eu de l’alcool, donc trop d’alcool, l’événement ne se tiendrait plus aujourd’hui.
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